Henri [-Léonard] Bordier appartient à une famille originaire de l'Orléanais qui quitta son pays au 16e siècle, afin de pratiquer librement les nouvelles idées de la Réforme. Installée à Genève, la famille Bordier reçut la bourgeoisie en 1571. Léonard Bordier (1778-1862) s'établit à Saint-Pétersbourg en tant que négociant, puis vint s'installer à Paris en 1812. Il épousa une Française, Anne-Marie Jubien avec laquelle il eut trois enfants : Henri-Léonard, Marc (1825-1831) et Léon (1827-18...). Léon épousa Marie Boyer, mais n'eut pas de descendant.
Henri (1817-1888) fut d'abord élève au Collège Louis-le-Grand comme l'attestent ses bulletins scolaires et la correspondance qu'il échangea avec ses parents. Il poursuivit ses études à l'Ecole des Chartes de Paris où il reçut, en 1839, le diplôme d'archiviste-paléographe. A sa majorité, il réclama la nationalité française; Paris resta ainsi toujours le centre de son activité malgré de nombreux séjours sur le sol genevois, car il n'oublia jamais la ville où ses ancêtres avaient trouvé refuge. En 1862, il acheta une propriété à Châtelaine où il aimait travailler, rencontrer ses amis et surtout sa famille qu'il chérissait plus que tout.
Henri [-Léonard] Bordier épousa en 1846 Hélène-Charlotte de Ron, une Suédoise (1823-1853) dont le père, Carl-Gustav de Ron, était banquier à Stockholm. Quatre filles nacquirent de cette union dont deux survécurent : Anne (1849-1900), future Madame Ernest Stroehlin et Léonie (1851-1939), future Madame Théophile Dufour.
Veuf en 1853, Henri [-Léonard] Bordier se remaria en 1858 avec la gouvernante de ses petites filles, Louisa Wright, originaire d'une famille nombreuse anglaise. Trois enfants nacquirent de cette union : Guillaume-Théodore qui mourut peu après sa naissance (1859), Angèle (1860-1888) de santé délicate qui demeura célibataire et Octavie (1864-), future Madame Adolphe de Magnin.
Prenant un soin particulier à l'éducation de ses filles, Henri [-Léonard] Bordier incita ses deux aînées à parfaire leur éducation à Genève, loin des trop nombreuses distractions parisiennes. C'est ainsi que l'aînée, Anne, épousa Ernest Stroehlin. Le père de ce dernier, le médecin Jean-Baptiste Alexandre Stroehlin avait épousé en deuxième noce Laure Amiel, soeur d'Henri-Frédéric Amiel. Laure Stroehlin devint ainsi la "belle-mère" d'Anne et Frédéric Amiel, un "oncle" (voir le Fonds Stroehlin).
Dès 1867, Henri [-Léonard] Bordier échangea une volumineuse correspondance avec le jeune et brillant Genevois Théophile Dufour; admirant son sens précis de l'histoire, il l'invita à Paris et à Châtelaine. Léonie fit ainsi sa connaissance et l'épousa en 1873. Théophile Dufour fut directeur de la Bibliothèque Publique et Universitaire [actuelle Bibliothèque de Genève] de 1885 à 1900 et consacra une grande partie de sa vie à préparer la publication de la correspondance de Jean-Jacques Rousseau. Très attaché à ses enfants, Henri [-Léonard] Bordier adressa plus de 160 lettres à Léonie. A travers cette correspondance, on assiste à la naissance de ses petits-enfants et à l'embellissement de Châtelaine, propriété qui resta toujours au coeur de la famille Bordier. "Que mes filles et mes gendres s'y trouvent bien, que leurs enfants s'y ébattent, y prospèrent, qu'ils l'aiment à leur tour et que tous nos coeurs s'y trouvent en communion, voilà ce qui ne coûtera jamais trop cher".
Léonie Bordier (1851-1939) et son mari Théophile Dufour eurent 4 enfants. L'aînée Hélène, naquit en 1874. Devenue écrivain sous le nom de Noëlle Roger, elle épousa Eugène Pittard en 1900 (voir le Fonds Noëlle Roger).
Henri [-Léonard] Bordier, historien, archiviste et bibliophile. Auteur de plus de deux cent publications, articles et livres dont les plus connus sont la "France protestante" et l'"Histoire de France", Henri [-Léonard] Bordier fut avant tout un historien français, archiviste aux Archives Nationales avant le Second Empire, conservateur des manuscrits de la Bibliothèque Nationale après le Second Empire et simple rentier sous Napoléon III, mais occupant ses loisirs à organiser la Bibliothèque du protestantisme français.
Une très vaste correspondance échangée avec les archivistes et historiens français témoigne de son labeur incessant et du caractère scientifique de ses recherches.
Dans cette quête d'informations précises, il n'hésita pas à acquérir un très grand nombre d'ouvrages souvent rares et précieux qu'il entreposa à Paris et dans le vaste grenier de Châtelaine. Devenu riche, il fit relier la plupart de ses livres en maroquin par Petit, successeur de Simier comme le démontrent les lettres et factures conservées avec soin.
[Notice biographique de Françoise Pittard, 1991]