Boris Mouravieff est né le 8 mars 1890 à Cronstadt, en Russie. De sa vie de famille, de sa jeunesse et des ses études, on ne connaît que peu de choses : un curriculum vitae et quelques photographies.
Dans ce curriculum vitae, Boris Mouravieff nous dit être diplômé de l’Ecole Supérieure de la Marine et avoir servi dans les forces navales de la Mer Noire pendant la première guerre mondiale. A-t-il alors été grièvement blessé comme son héros de "Intuition", roman d’inspiration autobiographique ? On sait seulement qu’en 1920, il quitta la Russie définitivement, laissant derrière lui ses diplômes et la fortune familiale.
Il séjourna alors à Constantinople et en Bulgarie avant de s’installer à Paris en 1924. Pendant son long séjour en France, il épousa une jeune russe, danseuse, Larissa Bassova [ou Bassoff]. [Cette] dernière avait un fils né en 1928 : Vsevolod Volkoff.
Boris Mouravieff travailla alors comme ingénieur dans la branche des combustibles tout en consacrant son temps libre à ses recherches relatives à l’histoire russe et à la tradition ésotérique.
Pendant la deuxième guerre mondiale, il fut arrêté par la Gestapo, parvint à fuir et se réfugia en Suisse en 1944. A partir de cette date, il est plus aisé de reconstituer la vie de Boris Mouravieff, car les documents remis à la BPU [devenue Bibliothèque de Genève en 2006] couvrent les années 1944 à 1966, année de son décès.
Ainsi, après avoir dû quitter la Russie puis la France, B. Mouravieff recommença sa vie en tant qu’historien et professeur. Il travailla d’abord à l’Ecole des Hautes études internationales, et depuis 1955, il enseigna à l’Université de Genève en qualité de privat-docent où il donna des cours d’histoire russe et de philosophie ésotérique.
Il publia également de nombreux ouvrages concernant essentiellement ses deux sujets de prédilection et finalement, épuisé par son travail, mourut des suites d'une crise cardiaque le 28 septembre 1966.
B. Mouravieff et ses manuscrits concernant l'histoire de la Russie
Comme Boris Mouravieff l'indique dans son curriculum vitae, il participa à des travaux archéologiques en Crimée; en France il consacra son temps libre à l'étude de l'histoire politique et diplomatique de la Russie, et à partir de 1940 commença à composer des textes d'après les recherches effectuées.
A travers sa correspondance, il apparaît clairement qu'il arriva en Suisse avec ses travaux historiques qui comprenaient alors "quelque 1500 pages, fruit de nombreuses recherches et de méditation" (Voir Ms. fr. 6451, f. 283). Malheureusement, ce manuscrit n'a pas été remis à la BPU [actuelle Bibliothèque de Genève], il n'en reste que quelques fragments (voir Ms. fr. 6477 et le supplément apporté en 1998, Ms. fr. 6492-6493).
Dès son installation à Genève, Boris Mouravieff écrivit le 24 avril 1946 à l'Institut universitaire des hautes études internationale afin de présenter "les Constantes de l'histoire de Russie et les temps nouveaux". "Au demeurant - ajouta-t-il - mon ouvrage comprend un exposé parallèle d'une synthèse de l'histoire russe et la Question d'Orient". (voir Ms. fr. 6452, f. 1).
Dix ans plus tard, dans la vaste correspondance échangée avec Henry Vallotton, Boris Mouravieff mentionna le 16 janvier 1957 : "Je dois encore faire les dernières retouches à deux manuscrits : d'abord à celui des "Origines du peuple russe", puis à un autre où je traite "La Question des temps antiques à la fin du XVIIIe siècle" (voir Ms. fr. 6451, f. 278).
Le 5 mai 1965, il écrivit encore : " "La Question d'Orient dès les origines jusqu'à la fin du XVIIIe siècle" est composé, mais n'est pas encore publié" (Voir Ms. fr. 6452, f. 33).
Ainsi, au cours des années, ce vaste manuscrit fut remanié plus d'une fois, divisé en nombreux chapitres ou parties portant des titres différents.
Boris Mouravieff n'épargna pas ses forces pour trouver un éditeur susceptible de s'intéresser à son oeuvre, il fit également appel à l'aide de professeurs genevois et demanda une aide financière au Fonds national de la recherche scientifique. En vain ! (Voir Ms. fr. 6452, env. 1-2).
Après son décès, en 1966, sa femme ou ses descendants poursuivirent l'idée de publier ce vaste travail comme l'indique, en 1972, le "En préparation" imprimé en face de la page de titre de "Gnôsis", tome III :
En préparation : "La Question d'Orient des temps antiques à la fin du XVIIIe siècle." "De l'Origine du peuple russe, les Russes sont-ils des Scythes ?"
Finalement, seul un fragment de cette oeuvre fut publié en 1954 sous le titre "L'alliance russo-turque au milieu des guerres napoléoniennes".
Boris Mouravieff et la philosophie ésotérique
Boris Mouravieff exprima d'abord ses pensées philosophiques dans un roman "Initiation" ou "La vie et les rêves de Boris Kouratov", roman qui ne fut pas publié (voir Ms. fr. 6476).
Il donna aussi des cours de philosophie ésotérique à l'Université de Genève de 1955 à 1961. (Voir Ms. fr. 6485). Il compléta ensuite ses notes pour les publier sous le titre de "Gnôsis", tome I, II et III (Ms. fr. 6477).
Une vaste correspondance avec les Editions "La Colombe" et son directeur Jean de Foucauld reste le témoin des difficultés de cette publication mais aussi des amitiés qui se nouèrent alors (Ms. fr. 6454).
Parallèlement à ces faits, Boris Mouravieff créa à partir de 1961 un Centre d'Etudes Chrétiennes Esotérique (C.E.C.E.) dont le comité central, à Genève, avait comme but de faire connaître cette nouvelle philosophie (voir Ms. fr. 6479, env. 1-3).
Dès la publication du premier tome de "Gnôsis" en 1961, Boris Mouravieff reçut de nombreuses lettres. Cette volumineuse correspondance réunie sous le titre "Correspondance adressée à Boris Mouravieff concernant la philosophie ésotérique" est écrite essentiellement par des lecteurs de "Gnôsis" qui avaient trouvé dans cet ouvrage un but à leur vie (Voir Ms. fr. 6455 - 1661).
Ces lettres contenaient également beaucoup de questions concernant la philosophie ésotérique; Boris Mouravieff ne se contenta pas seulement de répondre à chacune d'elles, mais il créa aussi des Groupes d'étude "Gnôsis" à Genève, Paris et ailleurs donnant ainsi la possibilité d'étudier sa doctrine à toutes les personnes qui s'y intéressaient. (Voir Ms. fr. 6479, env. 4-7 - 6481).
Ainsi, un correspondant peut être à la fois signataire de lettres dans la "Correspondance adressée à Boris Mouravieff concernant la philosophie ésotérique", puis devenir membre d'un Groupe "Gnôsis" (ses remarques apparaissent alors dans les comptes rendus des séances); enfin, cette même personne peut être l'auteur d'un travail concernant un chapitre de "Gnôsis" (travail conservé soit avec les comptes rendus du Groupe, soit seul lorsque le manque d'informations n'a pas permis un classement plus précis. (Voir Ms. fr. 6482).
[Françoise Pittard, catalogue dactylographié 35, f. 74-77]